Chapitre 4 : Gravé

    Mathilda avait passé une bonne partie de la nuit à discuter de la légende qui n’en était point une avec la doyenne. Elle se questionnait beaucoup. Mais même la doyenne et sa mémoire infaillible n’avaient pas toutes les réponses. Pourquoi les livres d’histoire n’avaient-ils pas retenu cette partie de la création du monde ? Pourquoi ne parlaient-ils que de politique ? Les questions tournaient encore et encore dans la tête de la jeune femme.

 

    Elle se renseigna alors sur ces fameux maitres. Sur ces neufs marqués qui transmettaient malgré eux leur marque à leurs descendants. Qui les marquaient de ces symboles aux grands pouvoirs et lourdes conséquences. Mathilda repensa aux paroles dans les airs tout en écoutant le discours sur les anciens maitres.

 

    « Commençons par les mages si tu le veux bien. Le maitre élémentaire, gardien des quatre éléments. Il maitrisait à la perfection d’après les ouvrages les quatre ce qui est assez rare. En général, ce don était surnommé le don des quatre dons, car son possesseur n’en possédait qu’un sur les quatre. Mais lui, il les avait tous. Un puissant mage, réfléchi et érudit.

 

    Il s’entendait d’ailleurs très bien avec l’elfe de vie, la doyenne. Comme tu le sais dans beaucoup de culture, il existe un cinquième élément appelé tour à tour, l’éther, ou encore l’énergie. Dans notre monde, ce qui s’en rapproche le plus était le don de vie. Ce don qui permet de communiquer et comprendre tous les êtres vivants. Le don d’altruisme par excellence.

 

    Reprenons sur les mages, les dons de sagesse et de mémoire étaient les spécialités de deux jumeaux. L’un était des plus réfléchis, le second agissait en mettant à profit son expérience. Le plus sage s’était, parait-il, entiché de la plus stratège des elfes. À eux deux, aucune attaque ne pouvait échouer. Toujours à l’arrière à élaborer des stratagèmes divers et variés. Ils agissaient comme un seul.

 

    De ce côté, celui à la mémoire d’acier était souvent un peu en retrait du groupe. Il mémorisait tout ce qu’il voyait, mais il avait aussi le défaut de voir dans les souvenirs et d’autant plus après l’acquisition de sa marque. Il était hanté par ses prémonitions et par ses souvenirs dont il ne pouvait se défaire. Malgré cela, un nain tentait toujours de l’aider. Le Courageux. Celui qui n’avait peur de rien et qui ne laissait aucune troupe sur le côté.

 

    Au-devant de la troupe. Nous avions un drôle de trio. La chevalière, fille du roi elfe, le forgeron, fils du capitaine de la garde naine, et le nain de pierre, un jeune soldat au don puissant. Les trois combattaient comme un seul homme. L’un créait du métal à partir de rien, le second le transformait en arme et la troisième éliminait les ennemis. Un trio que personne ne pouvait arrêter principalement quand le Stratège et le Sage étaient de la partie.

 

    Ce noble groupe était une équipe d’élite qui forma la première garde royale actuelle. Ils devaient se tenir prêts à l’arrivée potentielle des démons sur leurs terres. Quelques années plus tard, ils repoussèrent la première attaque. Mais ce fut loin d’être la dernière. L’elfe de mémoire avait eu une prémonition, mais personne ne sut réellement de quoi il s’agissait. On savait seulement que les démons étaient toujours une menace. »

 

    Après de longues heures de discussion, le soleil se leva. Mathilda en savait maintenant plus, mais était toujours un peu perdue. Elle devait parler à son père. Peut-être qu’il savait quelque chose sur un autre pendentif qui sait ? Peut-être que sa tante en avait un. La jeune femme avait du mal à se souvenir de ce que son père lui avait raconté sur sa tante. Tout était un peu flou. La fatigue commençait à la toucher de plus en plus.

 

    Elle remercia chaleureusement la doyenne et décida de rejoindre sa maison. Il y avait encore des points à éclaircir. Elle venait de s’embarquer dans une drôle d’histoire et qui pouvait en connaitre le dénouement. Elle ne savait même pas si sa marque était une malédiction ou bénédiction. En attendant, en avant vers le chemin de la maison et principalement du lit…

 

Quelques heures plus tard

 

    « En avant, ils ne doivent pas sortir du désert et toucher la ville »

    Une jeune femme venait de crier. Armes à la main, elle s’élançait en avant des troupes. Elle combattait avec vigueur. Elle était si précise que chacun de ses coups touchait une partie sensible ou fissurait une armure. Elle était si rapide qu’elle esquivait chacune des attaques avant de les rendre. Elle semblait danser avec ses épées. Elle jouait avec les ennemis avec grâce.

 

    Soudain, un coup dans le dos. L’armure se brisant instantanément sous l’impact. Cela ne l’arrêta pas. Elle se retourna pour faire face à son ennemi tandis qu’une nouvelle protection apparut sur son corps. Ses armes furent détruites en voulant blesser l’adversaire à la peau d’acier. Qu’à cela ne tienne, de nouvelles épées plus grandes et puissantes se créèrent dans ses mains.

 

    Elle ne rigolait plus. Un coup de pied, un coup d’épée. Elle analysait son ennemi à une vitesse folle. Elle devait trouver son point faible rapidement. Le peuple comptait sur elle. Elle qui entendait ses troupes se plier. Mais elle ne pouvait pas plier, elle n’avait pas le droit. Elle devait se battre encore et encore. Quitte à y laisser sa vie tant qu’elle savait que cela protégerait son monde et sa famille.

 

    Tout à coup, un cri la déconcentra. Pas n’importe quel cri. Sa sœur. Son sang ne fit qu’un tour. Elle devait utiliser ce qu’elle s’était promis de ne jamais utiliser. Elle n’avait pas le choix. Elle prononça alors trois mots dans une langue étrange. Le démon face à elle recula d’un pas. La jeune femme se mit a briller et une armure l’enveloppa de la tête aux pieds. Une longue épée gravée remplaça la sienne.

 

    En un coup, le démon fut renvoyé dans sa faille. En une seconde, elle était face à sa sœur. Un second coup et celui qui avait osé l’attaquer trouvèrent sa place dans son propre monde. Une larme s’échappa pour rouler sur le sol. Elles le savaient. Elles devaient le faire.

 

    Trois mots de la cadette et la voici elle aussi dans une nouvelle tenue. Main dans la main. L’une pointant son épée, l’autre pointant sa lance. Une forte lumière jaillit. La brèche se referma tandis que les deux corps tombèrent sur le sol. Les deux armes scintillèrent tout comme les deux femmes. Une nouvelle forte lumière.

 

    Une douleur.

    Intense.

    Un réveil en sueur.

 

    Mathilda se réveilla essoufflée. Elle avait une piste. Elle devait vérifier par elle-même. Le pendentif lui a fait revivre un souvenir. Elle en était sûre et certaine. Elle devait en avoir le cœur net.